Fil d'info

Le 06/11/2018

Article - Colloque Jérôme SIMIAN

Article réalisé par Ivan MOREAU, 5 Novembre 2018, https://culture-athle.com/

 

Suite des colloques automnaux : Culture-athlé s’est déplacé le 13 octobre à Nantes pour le colloque national « Techniques et progressions des exercices de renforcement pour l’athlète », colloque donné par Jérôme Simian, préparateur physique de Kevin Mayer et Melina Robert Michon.

Jérôme Simian (droite) et Bertrand Valcin, entraineurs de Kevin Mayer

 

Retour sur ce colloque avec Alain Donias  et Richard Cursaz , CTS à la ligue des Pays de la Loire et activement présents à ce colloque

 

Bonjour Alain, et merci pour votre disponibilité après l’organisation de ce colloque pour la ligue des Pays de la Loire et la FFA. Tout d’abord, quel est votre sentiment général après ce colloque ?

Très bon. Car nous avons eu une assistance nombreuse et intéressée avec plus de 140 personnes inscrites, rassemblant bon nombre d’entraîneurs de sensibilité et spécialités différentes.Très bon aussi car nous avons eu en la personne de Jérôme Simian, un intervenant de grande qualité tant par ses compétences que pas sa capacité à transmettre son savoir simplement. J’ai en particulier été conquis par son approche pragmatique y compris dans sa manière d’exposer les choses, sans trop de digressions comme on en voit parfois en colloque. Toujours axé sur son intention et les objectifs de cette journée et plus encore en aucun moment jamais dans le dogme de la certitude mais bien davantage dans le questionnement permanent qui m’a semblé être extrêmement important dans son approche de préparateur physique.

On vous sent conquis par le personnage Jérôme Simian ?

Oui car il ressort de son intervention cette capacité à dire sans langue de bois, ce qui est, ce qui relève de l’évidence anatomique et mécanique en sport, et plus particulièrement en athlétisme dont il maîtrise également très bien les bases techniques comme on aura pu l’entendre de ses expériences avec Mélina Robert Michon et Kevin Mayer

Plus techniquement son approche reposant sur l’observation anatomique et mécanique, puis la résolution des problèmes physiques et de leurs facteurs limitant induits, vous a donc intéressé ?

Oui tout à fait car on comprend à travers son exposé que tout ceci repose sur 20 ans d’expérience, des connaissances scientifiques affirmées et un pragmatisme reposant sur la recherche de solutions à des problèmes donnés. J’ai ainsi pu relever que cette approche n’exclut pas l’apport du technicien entraîneur en athlétisme, bien au contraire, Jérôme Simian étant très clair à ce propos : il n’est pas un entraîneur en athlétisme, même si pour chaque athlète qu’il coache il juge nécessaire l’effort d’acquérir un fond technique pour mieux appréhender les exercices physiques à proposer avec l’entraîneur « athlé » de l’athlète. On a ainsi pu le constater très concrètement quand il a évoqué sa collaboration de longue date avec Mélina et son entraîneur Serge Debie. C’est un système que j’utilise en collaborant moi-même avec entre autres…mon collègue Richard CURSAZ ou encore Marina CHARUEL-SIMON la kiné du pôle de Nantes avec qui j’ai demandé lundi quelques éclaircissements sur mes connaissances anatomiques.. et exploré ainsi des pistes de progrès comme évoquées ainsi par Jérôme Simian lorsqu’il explique aussi que le bon entraîneur, lui le premier, doit aussi être celui qui sait ce qu’il sait autant que ce qu’il ignore pour pouvoir recourir ainsi à la bonne compétence à chaque problème à résoudre.

En votre qualité de responsable formation à la ligue, à quelle catégorie/niveau d’entraîneurs conseilleriez-vous de s’ouvrir le plus à l’approche de Jérôme Simian du coup ?

A tous les entraîneurs, de mon point de vue. En effet j’ai trouvé dans son propos que tout un chacun pouvait en retenir quelque chose quelle que soit son expertise ou expérience dans l’entraînement. J’ai une petite citation personnelle qui me guide au quotidien et que je partage dans toutes les formations d’entraîneur « l’entrainement en athlétisme est hérité du passé et enrichit au présent ». Dans toute rencontre il y toujours quelques choses à retenir quel que soit son niveau de compétence, après, il faut travailler quotidiennement avec les athlètes et comme disait Yves HAZO ancien cadre technique à la FFA « ne prétendons pas former des entraîneurs en 10 jours … le secteur formation à la FFA vous donne de l’information »

Ce qui veut dire que cette intervention, précise dans son intention, peut néanmoins intéresser à plusieurs niveaux selon vous ?

Ce qui veut dire effectivement qu’après avoir reçu il faut mettre en musique et le meilleur laboratoire d’expérimentation au quotidien c’est le club ou la structure  avec les athlètes que l’entraîneur accompagne tout au long de l’année si possible plusieurs fois par semaine ! Maurice HOUVION disait « votre compétence sera fonction de votre engagement » c’est aussi vrai pour les entraîneurs que pour les athlètes…Ainsi l’intervention de Jérôme Simian a répondu à la commande de donner de l’information adaptable et transversale à bon nombre de disciplines de l’athlétisme et je pense que tous les entraîneurs présents sont rentrés chez eux avec chacun de quoi « travailler » dès leur prochaine séance en club. Par ailleurs ces colloques sont aussi des occasions de rencontre, d’inspiration que tout entraîneur doit saisir avec son vécu et sa sensibilité et ce colloque en était une belle occasion !

Et vous, si vous aviez été un jeune entraîneur sans le bagage qui est le vôtre, qu’auriez-vous retenu de cet atelier et de cette approche novatrice, en particulier pour gagner du temps sur vos savoirs ?

Comme évoqué déjà, difficile de parler d’approche complètement novatrice en préparation physique en athlétisme. Pour autant pour répondre à votre question , si j’avais été un jeune entraîneur j’aurais certainement aimé retenir l’approche anatomique de Jérôme Simian , les exercices sur l’arraché , l’approche corrective bilan-action qui structure son travail, car il ne faut rien négliger dans la performance et comme disait Joseph MAIGROT « le temps se venge toujours de ce que l’on fait sans lui » si on va trop vite dans la recherche de la performance métrée ou chronométrique , et en particulier pour les jeunes. J’aurais sans doute retenu aussi qu’on peut s’améliorer en sprint sans travailler spécifiquement la vitesse mais davantage les rééquilibrages entre rapports de forces comme il l’a fait avec Kevin Mayer pour passer de 10’’78 à 10’’56 juste sur cette méthode.

Très bien et avant de prolonger la suite de notre entretien avec Richard Cursaz, directeur de la performance de la ligue, avez vous d’autres projets de colloques ou actions de formations particulières avec la ligue Pays de la Loire pour la saison 2018-2019 ?

Le 16 mars prochain nous recevrons à Nantes Philippe d’Encausse et Sébastien Homo entraîneurs entre autres respectivement de Renaud Lavillenie et Ninon Guillon-Romarin, qui au-delà du thème de leur spécialité, le saut à la perche, aborderont à cette occasion les deux sujets suivants :

  • C’est quoi un entraîneur de Haut Niveau en athlétisme ?
  • Quelle est la formation d’un jeune qui participe aux championnats de France pour accéder à l’équipe de France senior ?

Courant octobre ou novembre 2019 il est également prévu un colloque sur la course hors stade et le trail : les intervenants, la date et le lieu restant à définir.

 

Bonjour Richard et merci à votre tour de répondre à ces quelques questions.  Comme pour Alain Donias, quel est votre sentiment général après ce colloque ?

Très bon également. J’ai beaucoup apprécié une approche culturelle différente et très enrichissante à voir, développée ainsi concrètement par ces ateliers proposés en situation terrain. Je connaissais le parcours de Jérôme Simian dans ses grandes lignes, passé par Staps puis formé au Canada au contact de Charles Poliquin, référence en préparation physique outre-Atlantique, et on a pu bien sentir sa spécificité de préparateur physique et plus encore son expertise dans le domaine, basée sur le diagnostic, l’analyse et la recherche de solutions appropriées. Comme dit par Jérôme Simian c’est aussi près de 20 ans d’expérience qu’il nous a donné à partager à travers ce colloque et j’ai particulièrement retenu l’importance d’identifier les facteurs limitant comme axes de travail .. Très intéressant et essentiel même.

En tant que technicien comment avez-vous perçu son positionnement vis-à-vis du coach athlé « technique ». Les participants au colloque auront compris que ça marche plutôt bien en disque et décathlon, mais pour vous est-ce transposable en sprint, votre spécialité, par exemple ?

Pour moi, techniquement, c’est transposable sans limite à toutes les disciplines de l’athlétisme et en particulier en sprint et sauts Jérôme Simian connaît le corps humain, l’anatomie et la mécanique, on voit qu’il cherche à avoir aussi la connaissance de la discipline de l’athlète, avec par exemple des connaissances techniques au disque qu’on aura senti bien affirmées par son vécu avec Mélina Robert Michon. Ça l’aide à se positionner et partager avec l’athlète et le coach, aussi à cet égard aucune limitation ou réserve à transposer pour le sprint pour moi par exemple. Après, on voit aussi qu’il est très pointu et que son approche nécessite une grande disponibilité en séance. Je le savais le concernant , sur ses méthodes terrain, ayant eu écho de quelques séquences de travail faite avec Mélina par le biais de son mari que je connais bien personnellement, mais j’ai encore pu m’en rendre compte davantage en séance de muscul mardi dernier ou dans le prolongement de ce colloque, j’ai juste constaté la difficulté de regarder, corriger, adapter des exercice et postures avec autant de qualité sur un nombre d’athlètes dépassant l’unité (une petite dizaine à cette occasion). C’est juste là pour moi, dans l’organisation, que serait la difficulté à transposer. Mais rien à voir avec la discipline donc.

Mais par rapport à une programmation de saison de sprinters avec les enjeux de travail de force, de technique et d’explosivité à atteindre en période de compétition ?

Non plus, car à travers l’exemple donné pour Kevin Mayer et son travail de force avant les Europe et Talence cette année, on voit que son approche de programmation fonctionnelle n’est pas mauvaise par rapport à nos habitudes culturelles de programmation plus en amont de la force en athlétisme. Elle est complémentaire et à ne pas voir comme un obstacle, mais plutôt comme une autre voie à nos nécessaires approches de programmation par cycles en revanche. J’ai noté en tout cas que l’adaptabilité conjoncturelle du travail physique pouvait s’entendre bien davantage que ce à quoi j’ai été formé et habitué à procéder dans une certaine « orthodoxie athlétique ».

Malgré votre expertise personnelle, vous affirmeriez pouvoir travailler avec ses méthodes sans souci avec lui donc ?

Oui sans souci et le plus tôt possible s’il résidait à Nantes bien sûr car la proximité est pour moi un élément essentiel dans ma vision du travail en équipe.

Sur un autre point, lors de l’atelier proposé (méthodologie au travail d’arraché et squat) 2 athlètes de très bon niveau dont l’un entraîné par vous, ont servi de cobayes avec pour chacun un diagnostic anatomique posé par Jerome Simian.  Avez-vous été surpris ?

Non pas du tout concernant Matteo dont on avait bien vu ce problème d’alignement de genou droit aussi. En revanche sa manière de poser le diagnostic, de se référer à des données anatomiques précises, le vaste intérieur de la cuisse ici, m’aura apporté une autre vision des éléments correctifs susceptibles de permettre une évolution positive de cette particularité chez Matteo. Ce sera l’objet d’un nouveau travail utilisant les suggestions faites par Jérôme Simian et en complément de ce que nous avons déjà apporté sur ce point, mais peut être pas dans le bon ordre.

Vous avez été référent relais à la fédération par ailleurs jusqu’en 2012. Jérôme Simian n’avait jamais été en relation avec vous à l’époque justement pour le collectif relais ?

Non pas jusqu’en 2012 quand j’ai arrêté cette fonction à la fédé. Je sais en revanche qu’il est déjà intervenu sur un rassemblement jeune à Boulouris il y a 2 ans et y retourne la semaine prochaine avec le mari de Mélina.

Sur sa méthode d’analyse et de ciblage de diagnostic avez-vous un regard particulier en tant que technicien ?

Sur son intervention, j’ai vu et ressenti beaucoup de pertinence ou en tout cas une grande volonté de l’être. On sent qu’il a emmagasiné beaucoup de références et expériences dans son métier et que cela lui sert constamment pour être le plus fin possible dans ses analyses, y compris pour s’éviter raccourcis et mauvaises pistes de solutions par défaut. Je trouve par ailleurs très intéressant le fait qu’il puisse opérer avec des athlètes de haut niveau susceptibles de tirer le meilleur parti de ses compétences à un âge où, pour eux, la meilleure performance ne découle plus en général d’une amélioration de la technique pure.